Alejandro Javaloyas
Enfant j’ai été diagnostiqué de douance et de TOC. J’ai une inclination naturelle vers l’obsession, le perfectionnisme et l’excès de contrôle. Ma pratique artistique explore la tension entre la liberté et le contrôle disproportionné, ainsi que le voyage transformateur qui se produit entre les deux.
J’associe le fait d’atteindre des émotions extrêmes, à une perte de maîtrise de soi. Me laisser aller me fait vraiment peur, je m’autorise à peine à le faire, la peinture devient mon seul échappatoire. J’essaye de transcender mes frontières quotidiennes, me remettre en question et à aller au-delà. Mes paysages abstraits sont très viscéraux. De plus, j’associe instinctivement et involontairement certaines couleurs à certaines ambiances de façon synesthésique. Pour moi, le bleu parle évidemment de rage, le rose de calme, le marron de nostalgie et le blanc de peur. C’est la raison pour laquelle la couleur et sa gradation jouent un rôle si important dans mon travail.
Orienté vers la lutte contre l’auto-oppression pour atteindre un niveau de liberté supérieur, je travaille dans le domaine de l’expressionnisme abstrait. L’abstraction et son absence de toute aspiration représentationnelle peut-être un langage, qui me permet de me concentrer sur le processus plutôt que sur le résultat. Lorsque la figuration s’estompe, il n’y a pas de bons ou de mauvais résultats. Par conséquent, je ne peux pas être piégé par ma propre recherche compulsive de la perfection.
Afin d’avoir encore moins de contrôle sur le résultat final, ainsi que d’incorporer le hasard et les accidents matériels au processus, j’ai développé ce que j’appelle des « mécanismes stratégiques pour perdre le contrôle » (terme qui est en soi un paradoxe, un paradigme de la contradiction humaine). Ces SMLC sont de nature très diverse. Un exemple que j’utilise très souvent consiste à mélanger tous mes crayons dans une seule boîte. La moitié d’entre eux sont solubles dans l’eau et l’autre à base de cire. En travaillant, je les utilise indistinctement. Une fois la première couche terminée, je procède à une forte humidification de mon support (avec des pinceaux, des éponges ou un vaporisateur) pour que les traces avec des crayons solubles dans l’eau commencent à se diluer, couler, tandis que les marques à base de cire restent nettes et définies. Ne pas savoir quelles parties du travail seront floues met en évidence la pertinence du processus (compris comme un voyage transformateur) par rapport au résultat et m’aide à adopter l’inconnu comme source de valeur artistique.
Je ressens un autre monde en peignant. Je crée des paysages abstraits qui ont pour moi un domaine métaphysique spacieux. Ils se comportent comme des dimensions alternées où mon alter ego peut simplement errer et se sentir libre. Comme l’a dit Piet Mondrian : « L’art est le chemin vers la spiritualité. »
Pour en savoir plus : https://www.alejandrojavaloyas.com/
